La région d'Akhalgori, appelée par les Ossètes de son nom soviétique Leningor, était la seule de l'ancien Territoire Autonome d'Ossétie du Sud a avoir été épargnée par le conflit du début des années 1990 entre Géorgiens et Ossètes. Après la guerre d'août 2008 et la débâcle de l'armée géorgienne, des milices sud ossètes en ont pris le contrôle, forçant la police géorgienne à se retirer et une bonne partie des habitants Géorgiens à l'exil.
Physiquement séparé du reste de l'Ossétie du sud par un massif montagneux et aisément relié à la région de Mtskheta par la route (elle s'étend sur la haute-vallée du Ksani, rivière qui se jette dans la Koura en amont de Mtskheta), le district d'Akhalgori était avant le conflit de 1990-91 majoritairement peuplé de Géorgiens.
Des Ossètes y vivaient également, surtout dans les villages au-dessus de la ville d'Akhalgori. Toutefois, même si le régime sud-ossète de Tskhinvali affirme que les Ossètes y ont été spoliés et forcés à l'émigration par les Géorgiens, surtout pendant la présidence de Zviad Gamsakhourdia en 1991-92, il semble que les deux communautés aient au cours des années 1990 et 2000 continué à y vivre dans une relative harmonie.
Eglise de Largvissi au Nord d'Akhalgori
Isolé de la capitale sud-ossète Tskhinvali et son ébullition politique, le district sud ossète d'Akhalgori n'a donc pas connu d'embrasement armé. Il est resté sous contrôle du gouvernement géorgien et a été incorporé à la région administrative de Mtskheta-Mtianeti. L'usine de bière Lomissi d'Akhalgori fournissait des emplois à la majorité de la ville d'Akhalgori (6000 habitants), le reste du district vivant comme la plupart des régions géorgiennes d'agriculture basique.
Mais en août 2008, la tentative géorgienne de conquérir Tskhinvali et les régions sud-ossètes sous contrôle du gouvernement séparatiste, et la contre-attaque russe qui s'ensuivit, ont sonné le glas de cette tranquillité. Cette région qui avait traversé les heures les plus sombres de l'histoire récente du pays a été prise dans la tourmente de la déroute géorgienne.
Sous l'impulsion de la victoire osséto-russe, les milices sud ossètes ont "passé la montagne" et ont chassé la police géorgienne qui stationnait à Akhalgori. L'armée géorgienne, qui avait de toute façon abandonné ses positions en Géorgie centrale pour se replier autour de Tbilissi, n'était pas stationnée dans le district. Un check point est à présent installé quelques kilomètres au sud d'Akhalgori, entérinant le contrôle ossète du district et sa perte pour la Géorgie.
Tbilissi accuse l'armée russe d'avoir aidé les milices sud-ossètes à prendre position à Akhalgori et participé au nettoyage ethnique. Le projet déclaré de construire une route reliant Tskhinvali et Akhaglori, qui ne peut se réaliser qu'avec une assistance technique russe, est en tête des chefs d'accusation de Tbilissi à l'encontre de Moscou.
Une bonne partie des habitants géorgiens d'Akhaglori ont été chassés par les milices ou se sont enfuis pour trouver refuge à Tbilissi ou dans d'autres camps de Géorgiens déplacés d'Ossétie du Sud après la guerre.
Le 27 novembre 2008, le président géorgien Mikhaïl Saakachvili tentait d'emmener son hôte le président Polonais Lech Kaczynski à Akhalgori, en passant outre l'interdiction des miliciens sud ossète. Mais cette sombre affaire s'est terminée en un demi-tour, le parti géorgien affirmant qu'on avait tiré sur la voiture transportant les présidents, les autorités sud-ossètes niant ces accusations et le président polonais devant faire face à un scandale dans son pays, pour s'être exposé sans mesures de sécurité dans une entreprise non prévue à son agenda et peu en règle avec les usages d'un président en visite.
Il est encore difficile d'établir ce qui s'est passé et se passe à Akhalgori depuis que les milices sud-ossètes en ont pris le contrôle. Il est en tous cas certain qu'il y a eu un exode important des populations géorgiennes, qui constituaient la grande majorité de la ville d'Akhalgori, et que les activités préalables que cette dernière connaissait ont pour bonne part cessé.
Les photographies exposées ici ont été prise en juin 2008, deux mois avant la guerre.
Nicolas Landru
Droits d'auteur des photographies, sauf exception : ©Nicolas Landru et Birgit Kuch